Journal de captivité de mon grand-père SADLER Jacques, malgré-nous de 1943 à 1945


à la une, recherches généalogiques / mercredi, août 8th, 2018

Retranscription du journal de captivité de mon grand-père SADLER Jacques, mosellan, malgré-nous, incorporé de force dans l’armée Allemande en 1943, déserteur en 1944, condamné à combattre sur le front russe où il est fait prisonnier en 1945.

Les photos sont la plupart du temps des photos de papiers de famille originaux, ou des photos sourcées en ligne pour illustrer ces moments de vie.


Voici auparavant 2 autres articles pour en savoir plus sur les périodes précédant sa captivité :

Introduction par SADLER Jacques 

« Par bonheur, j’avais parmi les quelques affaires en ma possession, un petit calepin et un crayon que j’ai réussi à soustraire à toutes les visites, et elles étaient nombreuses, qu’on nous a fait subir en captivité. Je rapporte ici quelques impressions qui m’ont particulièrement marqué pendant les 4 mois passés derrière les barbelés et que j’ai notées au hasard des journées. »

 

17 mai 1945

1/ La première chose qui frappe un homme pensant normalement est le manque absolu de camaraderie dans l’armée allemande. Observation déjà faite plus tôt, même dans des temps meilleurs. Surtout à la distribution de la soupe, beaucoup se précipitent dessus comme des loups affamés, prennent deux ou trois portions (si c’est possible), tandis que d’autres n’ont rien !

2/ Manque absolu de caractère :du jour en lendemain, personne n’est plus national-socialiste, personne ne l’a jamais été vraiment à les entendre. Il y a quelques jours encore, on n’osait pas dire la moindre parole sur le régime ou sur la situation désespérée sans qu’on ait été dénoncé. Aujourd’hui tout est changé.
traits caractéristiques de l’allemand : tout le monde a depuis longtemps su que la guerre était perdue, mais qu’est-ce qu’on nous a encore raconté il y a une semaine !

1er juin 1945 : la vie au camp

C’est un immense camp, avec des baraques en bois, quelques-unes en pierres. Derrière chaque bâtiment un terrain de sport avec poteaux de basket.C’est un ancien camp pour officiers français situé à Hoyerswerda. Une grande rue goudronnée le divise en deux. Autour de chaque baraque des plates-bandes ont été aménagées. Que va-t-on y planter ! À chaque coin, des ronds-points avec des emblèmes soviétiques.

Comment se passe ainsi une journée dans ce camp immense où vivent près de quarante mille prisonniers ? C’est un continuel va-et-vient. À toutes ces figures on se demande vraiment où on se trouve. Beaucoup en civil, d’autre moitié civil et moitié militaire, les cheveux tondus à ras, ils font une figure plus piteuse encore que les prisonniers russes qu’on avait tant montrés dans les cinémas.
Vraiment, des fois il faut secouer la tête et se demander si ce sont là les hommes qui ont voulu dominer toute l’Europe. La plupart ne se lavent pas, partout ils attrapent les poux et les puces. Partout de petits groupes se forment, discutent. Les bruits de cuisine les plus fantastiques circulent, gonflent et éclatent. D’aucuns passent, croient entendre quelque chose et racontent tout de suite les bobards les plus invraisemblables. Tout le monde dit du mal du national-socialisme, jamais quelqu’un a voulu en savoir quelque chose. C’est quand même bizarre cette mentalité allemande, mais elle est très typique.

Le matin à 6 heures réveil. Le premier jour on pouvait dormir plus longtemps, mais maintenant il faut que 10 minutes après tout soit dehors, bien aligné, et le chef de baraque va faire son rapport au chef de camp. C’est vraiment pire qu’à la caserne. Mais enfin !
Ensuite de petits groupes vont au travail, bêchent des plates-bandes, transportent du bois, vont chercher du pain, ou la soupe.
Il faut dire que la distribution de la soupe commence déjà longtemps avant 6 heures. Ce n’est pas étonnant avec le nombre de prisonniers.

20 mai 1945

Une seule pensée m’attriste et ne me quitte pas : que peuvent bien faire mes chéris à la maison. Sûrement ma Cécile adorée se fait toutes sortes d’idées, tous les jours elle attend le retour de son mari. Quelle patience lui faut-il quand même. Dans chacune de ces lettres elle a montré tant de courage et d’espoir, vraiment je l’ai admirée pour sa patience ! Et maintenant ! Combien de temps faudra-t-il qu’elle attende encore ? Ma chérie, si je pouvais seulement te donner signe de vie, tu reprendrais de nouveau courage. Mais sois tranquille, ton Jacques a bon espoir, tu sais qu’il t’a toujours été fidèle, et que toutes ses pensées n’avaient qu’un but, ses deux chéris qu’il aime par-dessus tout au monde.

Ma chérie, tu as un petit Roby qui te console sûrement beaucoup. À propos, j’écris petit Roby, mais il doit déjà être bien grand ! Le pauvre chou ne reconnaîtra pas son papa quand celui-ci reviendra. L’année dernière, quand je l’ai vu, il était bien petit, mais si mignon et lui s’était vite habitué à son papa. Quelles belles heures avons nous passées ensemble dans notre gentil appartement à Cadenbronn. Jamais je n’aurais cru que la vie en famille était si douce ! Si j’avais pu rester auprès de toi, ou si seulement je t’avais écoutée ! Ma chérie, je ne voulais pas que tu eusses des ennuis, je voulais tout prendre sur moi et supporter avec courage. Depuis j’ai eu des heures bien difficiles, mais je ne me suis pas plaint.Toi aussi, tu as peut-être vécu des instants plus durs que moi, car dans les derniers temps j’avais toujours un peu de chance. Tu as prié Dieu pour qu’il me protège.

Puisse notre seigneur Tout-Puissant me garder ainsi dans l’avenir et me ramener sain et sauf auprès de toi. Tous les jours je prie Dieu pour qu’il me protège dans chaque situation et je suis sûr qu’il m’exaucera.Nous sommes en ce moment dans le beau mois de mai, le mois de Marie. Combien de grâces a-t-elle déjà accordées à ceux qui l’ont appelée du fond de leur cœur dans leur détresse. Plein de confiance, je l’appelle aussi pour qu’elle intercède pour moi. Jamais on a entendu que quiconque ait imploré du fond de son cœur la vierge toute-puissante n’ait pas été exaucé. Pentecôte est passé, ainsi un jour passe après l’autre et toi ma chérie tu m’attends avec impatience.

Quand serai-je auprès de toi ? Chaque fois que je m’endors et Dieu sait si je dors souvent, presque toute la journée, je rêve à mes chéris, je suis heureux avec eux. Ah ! Si seulement cela pourrait être réalité mais ne désespérons pas, je m’incline à la volonté de Dieu prêt à tout supporter sans murmurer. Que ta volonté soit faite et non la mienne.

19 mai 1945

Pendant les derniers jours, le manque absolu de camaraderie s’est manifesté une fois de plus, surtout en route, sur notre marche vers les camps de captivité. De temps en temps on a pu avoir de l’eau. Certains avaient leur sac plein de conserves et de pain, mais pas une miette pour les copains. Au contraire, ils auraient encore pris des autres.

Même la distribution du peu de manger est faite d’une façon incorrecte. Beaucoup ont touché deux fois du pain et l’ont caché dans leur couverture et il a fallu toute la force pour qu’ils la donnent à d’autres qui n’en avaient pas. Trait caractéristique vraiment allemand ! Jamais ils n’ont assez et ils ne s’occupent pas si les autres ont quelque chose. Quelle différence quand même avec la camaraderie de l’armée française !

11 juin 1945

Encore une semaine qui commence et nous nous trouvons toujours derrière les barbelés du camp d’Elsterhorst. Si cela pouvait être la dernière.

Mais malgré tous les bruits de cuisine très réconfortants, je ne crois absolument rien, je suis pessimiste au plus haut degré.
Car comment doit-on savoir ici quelque chose quand on vit comme dans un cloître, complètement isolé du reste du monde, sans nouvelles. Les bruits les plus fantastiques circulent.
Vendredi soir encore on a parqué à part tous les étrangers.
Tout de suite chacun a eu le ferme espoir de bientôt venir à la maison. On nous a mis dans d’autres baraques.

On se croirait vraiment à Babylone, car on entend presque toutes les langues d’Europe : français, flamand, hollandais, italien, tchèque, serbe, polonais, hongrois, roumain, etc. c’est seulement maintenant qu’on remarque combien les boches avaient recruté d’étrangers. Que peut-on bien vouloir faire avec nous et pourquoi nous a-t-on triés ! Maintenant nous sommes en nombre assez considérable d’alsaciens-lorrains. J’ai avec moi un autre Sarregueminois Pierre Henrich de la rue du Maréchal Foch. D’autre sont de Bitche, Forbach, Hagondange, etc. Ce serait beau si on pouvait rentrer à la maison.

Nous avons pourtant tous l’espoir que le général de Gaulle fera des démarches pour que nous devenions libérés car pourquoi devrions-nous souffrir avec les boches pour des fautes dont eux seuls sont responsables. On admet aussi qu’on va nous mener vers un autre camp et que là on ira travailler. Après demain je serai déjà prisonnier cinq semaines et toujours cette inaction. Cela ronge physiquement et moralement.

12 juin 1945

Nous avons changé de baraque on est dans la dernière maintenant avant de quitter le camp. Mais on nous conduira-t-on après ? Question que tout le monde se pose avec anxiété. Ou bien sera-ce dans des équipes de travailleurs quelque part ou bien sera-ce peut-être pour rentrer chez nous ! Mais cette dernière solution me paraît peu probable malgré la grande confiance de la majorité des copains. Je suis de l’avis qu’on végétera encore dans d’autres camps avant de pouvoir rentrer chez nous.

Les bruits de cuisine les plus fantastiques se répandent à des allures vertigineuses et la plupart y croit. Mais moi, je suis pessimiste au moins pour le moment. Ce serait beau tout ce qu’on raconte, oui trop beau. En tout cas, une chose est bonne, c’est de pouvoir quitter une fois ce camp, on aura eu un peu de changement d’idées, soit par une marche à pied, soit par un voyage en chemin de fer. De plus on aura de quoi nous occuper et les idées pessimistes passeront un peu.

Toutes les nuits, je rêve de mes chéris à la maison et de Cadenbronn . Quand pourrai-je les revoir ? Voilà déjà plus d’un an que je les ai quittés lors de mon départ de permission. Là je n’aurais pas cru que j’en viendrai encore là . Pourtant je n’ai pas perdu l’espoir que dans un temps prochain je les reverrai sains et saufs. Tous les jours, je prie Dieu et la Sainte vierge de m’accorder cette grâce et jusqu’à présent mes prières ont été exaucées.

Si seulement je pouvais écrire un petit mot à la maison. Qu’ils aient un signe de vie de moi. Bon nombre de soucis seraient enlevés à ma Cécile chérie. Combien doit-elle se tracasser !
Espérons que bientôt ses souffrances physiques et morales prendront fin.

13 juin 1945

C’est le saint Antoine aujourd’hui. Pourvu que ce Saint à l’intercession si puissante vienne un peu à mon aide.
Il ne m’a encore jamais abandonné.

L’année dernière à cette époque on vint me chercher de Naumburg à Sarrebruck et là je partais aussi vers l’inconnu car je ne savais pas ce qui m’attendait et tout s’est quand même bien passé. Que donnerais-je si je pouvais rentrer à la maison.
Ce n’est pas seulement à cause du manger, mais surtout pour échapper à cette vie exécrable, une vie comme jamais je me l’étais représentée.

Dirait-on qu’on a affaire à des hommes ? Ce sont plutôt des bêtes sauvages. Je suis sûr que ces dernières entre elles se comprennent mieux que cette horde de prisonniers. Si on avait un appareil cinématographique pour pouvoir retenir quelques-unes des scènes caractéristiques de cette triste vie ! C’est surtout pendant la distribution de la soupe que les esprits sont surexcités.
Là, un braillement indescriptible se fait entendre, tout le monde se met autour de la cuve et regarde avec des yeux affamés et a peur qu’il n’aura plus rien. Quelques-uns ont de la chance et trouvent dans leur gamelle un petit bout de viande (Sondermeldung) et deux ou trois morceaux de pomme de terre.
Ceux qui ont touché leur manger restent auprès de la cuve, faisant à peine de la place à ceux qui suivent. Cela ne m’étonnerait pas du tout qu’un beau jour un russe vienne avec un grand bâton et tanne à chacun la peau. Ils le mériteraient presque tous, car on trouve peu qui soient raisonnables.
Je souffre surtout moralement de vivre au milieu de tous ces gens. Quelles grossièretés se jettent-ils à la longueur de journée à la tête ! Et pour des riens. On a beau vouloir les rappeler à la raison, c’est tout juste si on ne se fait pas taper dessus par eux encore !

Pourtant, malgré tout, je ne me plains pas, je veux tout supporter avec courage et résignation ayant l’espoir et la foi en Dieu d’être bientôt délivré de cette captivité et de pouvoir retourner auprès de ma chérie à la maison. Je voudrais écrire et ne plus m’arrêter, mais dans ce chahut c’est presque impossible. On a de la peine à rassembler ses idées.

Autrefois, c’est-à-dire il y a encore six ou sept mois, j’écrivais tous les jours une lettre à ma femme adorée. Après chaque lettre, je me trouvais si réconforté, mais depuis que je ne peux plus t’écrire je souffre terriblement.

Hier nous avons encore une fois été aux douches et à l’ « Entläusung ». Un temps de chien, rester dehors pendant des heures entières à la pluie. Une organisation de tous les diables. Maintenant nous attendons la suite des événements. Je me suis résigné pour le moment au pire. Enfin, qui vivra verra. Gardons confiance et espoir en Dieu. Il saura déjà nous conduire et nous guider.

14 juin 1945

Aujourd’hui, je suis pessimiste plus que jamais.
À quoi cela tient-il ? Est-ce le mauvais temps, ou bien un présage ? Je ne saurais le dire. Si je pouvais me tromper ! Ce n’est pas étonnant aussi par cette vie si malheureuse. Le manger diminue de plus en plus : de moins en moins de soupe, la ration de pain de même. On est tellement fatigué même à ne rien faire. Quand on se lève, tout tourne devant nous, on ne voit rien que des points noirs, c’est tout juste si on peut se tenir sur ses jambes. Où cela doit-il conduire ? Si maintenant une épidémie devait se déclarer, il y en a peu qui pourraient résister .

Seule la confiance en Dieu et la foi me soutiennent encore et la certitude que ma petite femme adorée m’attend avec impatience à la maison avec mon petit Roby chéri. C’est pour eux que je veux tout supporter espérant que je pourrai malgré tout, bientôt, les revoir à la maison.

Ici il faut vraiment avoir des nerfs d’acier, car du matin au soir, il y a un chahut épouvantable. Pour un rien de grandes disputes, mais ce n’est pas étonnant. Pourtant on pourrait mieux se retenir, mais c’est surtout dans des situations pareilles qu’on voit l’éducation des gens et évidemment l’éducation allemande émerge plus nettement que jamais. C’est le fruit de douze ans de national-socialisme. Qu’est-ce que cela aurait donné s’ils avaient gagné la guerre ? Personne n’aurait plus pu le supporter sur cette terre.

Mais c’est malheureux que nous qui, dès le début, avons combattu et protesté de toutes nos forces contre ce système soyons obligés d’en subir les conséquences maintenant.
C’est par la force qu’ils nous ont incorporés, surveillés, et maintenant certains veulent même nous faire croire que nous ne sommes pas des Français. Mais jamais je ne me suis senti plus français que maintenant. J’espère aussi que le gouvernement français et notamment le général de Gaulle entreprendra quelque chose pour nous libérer.Sinon on aurait perdu toute confiance en ce si beau pays de la France. Quand on pense à tout ce qu’on a fait à la maison pour les prisonniers français, on a risqué même notre vie pour les aider dans la fuite. Si quelqu’un pouvait maintenant venir nous aider ! Rien n’est impossible et peut-être ce miracle se produira-t-il.

17 juin 1945

Encore un dimanche presque passé.
Si cela pouvait être le dernier derrière les barbelés !

Aujourd’hui j’ai encore une fois un cafard terrible, tout le temps il a fallu que je songe aux beaux dimanches passés à la maison, soit à Cadenbronn, soit à Sarreguemines, ou autre part. C’est surtout cette tranquillité et ce sentiment de bien-être qui me manque.
Évidemment la nourriture y est même pour une grande part, vraiment bien manger à sa fin. Quand viendront-t-ils de nouveau ces temps heureux où on avait l’embarras du choix ?
Ici on attend avec impatience le retour du pain quotidien et on l’avale comme un loup affamé.

Ma chérie, qu’as-tu bien pu faire aujourd’hui de ta journée ! Toutes tes pensées ont volé auprès de ton Jacques adoré, que peut-il bien faire ? Est-ce qu’il vit seulement encore, etc. Tu es été à la messe ce matin et tu as offert ce saint sacrifice pour que nous puissions bientôt nous revoir sains et saufs. Que Dieu puisse exaucer nos prières et nos vœux communs. Quelle grande joie pour nous.

22 juin 1945

J’éprouve le besoin d’écrire encore quelques lignes, quoique cette vie au camp soit toujours pareille et que là-dessus il n’y a plus beaucoup à écrire.

Depuis quelques jours, le temps s’est sensiblement amélioré. Il fait même des chaleurs presque insurmontables. Pour le peu de nourriture qu’on reçoit, et bon nombre de prisonniers ne peuvent résister et tombent comme des mouches. Il est seulement à souhaiter qu’une épidémie ne vienne pas éclater, car elle aurait sûrement des conséquences désastreuses, les médecins n’ayant presque pas de médicaments. Hier, début de l’été, temps excellent, bonne nouvelle aussi pour nous : le chef de baraque nous apprit que les « Arbeitskommandos » étaient supprimés et qu’on allait commencer lentement avec la libération des prisonniers. Notre rêve et vœu va-t-il donc quand même se réaliser maintenant ? Depuis deux jours aussi, je me sentais beaucoup plus optimiste, chose qui ne m’était arrivée depuis longtemps. Évidemment on avait l’habitude de voir tout en noir car c’était une habitude d’être mené au nez, avec cette propagande nazie.

D’après mon avis, les prisonniers vont être libérés, resteront quelque temps à la maison et de là iront sûrement pour un temps déterminé travailler en Russie ou ailleurs soit dans une autre région comme ouvrier, une sorte de « Westarbeiter », là il aura plus de courage et de joie au travail que comme prisonnier, il sera plus libre, aura des nouvelles de sa famille, saura au moins pour combien de temps il restera là-bas et c’est ce qui est l’essentiel.
Combien cruelle et l’incertitude dans laquelle nous vivons actuellement. Évidemment il se peut que cela dure encore quelques semaines, mais je veux bien les supporter sans murmurer. J’ai le ferme espoir qu’au mois de juillet je pourrai revoir mes chéris à la maison.

27 juin 1945

Aujourd’hui il pleut toute la journée, dehors tout est inondé. C’est dommage car on ne peut plus se coucher au soleil comme on n’en a pas pris l’habitude. Je suis devenu tout brun au corps. Cela fait vraiment du bien de s’étendre à longueur de journée au soleil. Les derniers jours, il me semble que l’optimisme a considérablement diminué chez la plupart des prisonniers, quoique tout le monde en parle de rentrer.Samedi, on a rempli des listes nouvelles pour les départs. Qu’est-ce à dire ? Mais tout traîne trop longtemps, on ne voit pas de commencement.

Les deux derniers jours, on a eu 3/10 de pain par homme. Et tout de suite le « Tauschhandel » (troc) a de nouveau commencé, mais je crois que bien peu aient encore du tabac à échanger contre du pain. D’autres touchent leur pain et tel quel le mettent dans leurs sacs et regardent les autres manger. Quels drôles de gens quand même. D’aucuns ont en ce moment presque une miche entière et avec cela ils réclament toujours de se sentir mal, que la tête leur tourne de faim. Vraiment typique boche ! La soupe du matin n’est plus que de l’eau un peu sucrée. Il faut vraiment avoir une grande faim pour manger cela. Mais enfin on s’habitue à tout.

On fait passer le temps par les occupations les plus diverses. Je me suis amusé à rafraîchir un peu mes connaissances en mathématiques, qui par manque de pratique me semblent un peu enrouillées, extraire des racines carrées, faire un peu de trigonométrie, telles sont les activités auxquelles je m’adonne. Il faudrait avoir quelques jeux, tels que : les échecs, les cartes etc., mais rien de cela. Beaucoup dorment jour et nuit dans leurs baraques, c’est tout juste s’ils sortent pour aller chercher leur manger. Mais une telle vie n’est pas saine et agréable non plus.

On parle aussi souvent des belles heures passées à la maison, chacun dans sa famille et sa profession. C’est vraiment là qu’on voit comment chacun est attaché de tout cœur à sa patrie.
Évidemment des bons menus ne manquent pas et chaque fois l’eau nous vient à la bouche. Je crois aussi que lorsque je serai rentré, je n’arriverai plus à être rassasié, toute la journée j’ai faim. Mes 900 g de pain sont partis d’une seule traite et j’aurais pu continuer si j’en avais eu encore. Je pense sans cesse aux bons gâteaux, crêpes, etc. et une fois la maison il faudra que ma femme me nourrisse les quinze premiers jours rien qu’avec de la farine. Je la plains déjà maintenant la pauvre de passer de nombreuses heures auprès du four, mais elle le fera avec plaisir pour son chéri. Si seulement j’étais déjà à la maison. Mais ne perdons pas courage, cela viendra bien un jour.

28 juin 1945

Aujourd’hui, on semble avoir jour de fête, le matin et l’après-midi une bonne soupe, 2/5 de pain (1200 g), vraiment on veut nous gâter. Quelques-uns prétendent que c’est l’anniversaire de Staline, mais je n’en suis pas si sûr. Pourtant cela se peut. Hier soir, là encore, on a eu une grande discussion au sujet des nationalités.

Est-on Français ou boche ? Pour nous la question est claire et ne fait aucun doute, mais certains Allemands répètent les phrases que la propagande nazie leur a broyées, que nous étions volontaires. D’autres prétendent même qu’on a été volontaires et qu’on a crié « Nous voulons retourner au Reich ». Ce n’est pas étonnant qu’on perde les nerfs à force d’entendre des bêtises pareilles. Là je ne peux plus me retenir et chaque fois je suis d’une colère terrible. Quand on pense à tous ses maux dont ils sont la cause, à ces nombreuses familles malheureuses et déchirées, on ne peut avoir de pitié pour des malfaiteurs pareils !
Malgré tout, beaucoup ont encore leurs idées nazies dans la tête, rien qu’à les entendre parler, on pourrait déjà les prendre au collet. Ah non ! Jamais je ne me suis senti plus français que maintenant, nous n’avons rien de commun avec ce peuple égoïste et barbare.

Évidemment nous sommes une population frontalière mais c’est une raison de plus pour montrer notre orgueil national français, et mépriser et haïr tout ce qui est allemand, ainsi qu’eux l’on fait à notre égard. Ne connaissons plus de pardon et de pitié, ne nous laissons plus envahir le même sentiment humain comme en 1918 et nous serons sûrs de pouvoir vivre longtemps en paix, car cette fois ils ne se relèveront plus. Espérons que les gouvernements des Nations unies prendront les mesures nécessaires pour empêcher tout nouveau conflit dans les temps prochains. Ainsi nous pourrons vivre dans notre cher pays frontalier, sans crainte d’être envahi à chaque instant par ce flot barbare et nous pourrons passer de belles heures encore auprès de nos familles.

2 juillet 1945

Encore une semaine commencée derrière les barbelés. Combien en passerons-nous encore avant de rentrer chez nous ? Les nerfs sont de plus en plus tendus, on commence à se laisser aller, se « foutant » presque de tout. Combien de courage ont dû avoir des prisonniers qui ont fait cinq ans ! Et chez nous, il y a à peine huit semaines de passées. Mais on parle tellement de libération et on ne voit pas de début ! C’est presque à désespérer.

Hier matin je suis sorti pour la première fois du camp pour aller chercher, avec une équipe, du bois de chauffage pour la boulangerie près de la gare Hoyerswerda. Vraiment on s’est réjoui de tout pour rien, un train qui passait, un troupeau de vaches dans une prairie, quelques fleurs. Quelles belles odeurs a-t-on pu respirer. J’en ai eu d’autant plus le cafard, me rappelant les belles promenades à travers champs et bois à la maison.
On n’a quand même remarqué qu’on n’avait plus de force dans les os. Ce n’est pas étonnant quand on est resté là huit semaines à ne rien faire. Pourtant je suis sûr que tout reviendra une fois que nous serons de nouveau à la maison.

8 juillet 1945

Encore un dimanche de passé. Sera-ce bientôt le dernier ?
J’ai meilleur espoir peut-être encore ce mois. Des paroles encourageantes circulent, des « Politische Leiter » et les « S.S » ont été mis dans une baraque à part depuis quelques jours.
Aujourd’hui le temps a été un peu meilleur que d’habitude.

Ce matin, de bonne heure, on nous a donné un concert par l’orchestre du camp. Une distraction comme une autre. Cet après-midi on a assisté à un match de football, mais bien pauvre, on remarque bien que tout dépend quand même de la nourriture, aussi le match a seulement duré une heure. Ainsi un jour passe après l’autre, on attend avec impatience (que faire autrement) le jour où on pourra définitivement sortir de derrière les barbelés pour rentrer chez nous. Ce sera sûrement un des plus beaux jours de ma vie ! Presque tous les copains voient tout en noir et moi je cherche toujours à les encourager et leur redonner de l’espoir.

Et si je me trompais moi-même ? Ce serait une grande déception, mais pour cela je n’irai pas me casser la tête contre un mur.
Espoir, courage, confiance en Dieu sont les seules choses sur lesquelles je me base encore. Il faut penser aussi et surtout à nos familles à la maison, qui se font encore bien plus de soucis maintenant. Prions Dieu pour que bientôt leurs et nos prières soient exaucées et qu’une vie normale au sein de ma famille puisse reprendre.

9 juillet 1945

Cet après-midi tout le Bloc a de nouveau été trié : les jeunes de moins de 17 ans, les vieux au-dessus de 50 ans, les malades sont sortis des groupes. Que veut dire cela encore ? Tout le monde croit maintenant à un « Arbeitseinsatz » (service du travail) et les bruits les plus fantastiques circulent. Que doit-on croire ? Pourtant j’ai bon espoir d’être bientôt à la maison. Chaque fois que je m’endors, je rêve de la maison. Mon espoir et mon courage ne peuvent pas être trompés.

Cet après-midi éclipse de Soleil, très bien visible à l’œil nu.
Est-ce un bon ou un mauvais présage ?

 

 

 

 

 

14 juillet 1945

Fête nationale française aujourd’hui ! Et encore derrière les barbelés.

Mais maintenant je suis persuadé que dans les temps prochains nous saurons libérés. Ce matin on nous a pris nos manteaux et nos couvertures, il y a quelques jours les deuxièmes garnitures, enfin tout ce qui était double. Tout laisse prévoir une libération prochaine. Espérons que nous ne serons pas déçus. Hier on parlait d’une commission internationale (Interalliée) qui devait passer aujourd’hui. Mais jusqu’à présent on n’a rien vu. Tout le monde croit en la libération imminente, pourtant il reste des pessimistes qui voient tout en noir. Les bruits de cuisines les plus fantastiques circulent. Enfin espérons.

Depuis quelques jours, on nous donne à manger une drôle de soupe avec des poissons séchés. Cela a un goût singulier, presque impossible à manger. Mais que doit-on faire quand on a faim ? L’essentiel c’est qu’on n’a chaque jour ses 1/5 de pain.
À ce point de vue, on n’a pas se plaindre et le pain est très bon et nourrissant. Les derniers jours, on a pu de nouveau se coucher au soleil et prendre un bon bain de soleil à longueur de journée. Cela fait beaucoup de bien au corps.

Je passe mon temps à faire de l’anglais, traduire des thèmes. Aussi le temps me paraît beaucoup moins long. A propos j’ai trouvé ce livre dans le camp (ancien camp de prisonniers officiers français – OFLAG). Et cela pourra toujours me servir. En tout cas, j’ai beaucoup revu. Cela pourra toujours me servir. Où sera-t-on dans quelques jours ?

Chaque nuit je rêve de la maison, à ma Cécile chérie et mon petit Roby adoré qui accourt chaque fois à ma rencontre. J’ai le pressentiment que bientôt je pourrai les revoir sains et saufs à la maison. Jamais un pressentiment ne m’a trompé. Aurais-je encore raison cette fois-ci ? J’espère toujours pour ma fête être à la maison. Ma femme adorée avait l’année dernière à cette époque bon espoir que cette année je serai auprès d’elle.
Nous avons prié Dieu de tout notre cœur pour qu’il exauce nos prières et notre espoir est meilleur que jamais. Puisse-t-il ne pas être trompé.

20 juillet 1945

Plus de dix semaines en captivité sont passées, nous nous trouvons déjà dix semaines dans un Marschblock et toujours derrière les barbelés. Quand donc cela prendra-t-il fin ? C’est presque à désespérer et quand même les paroles les plus encourageantes circulent. Dans quelques jours tout le monde doit être libéré car le 12 août doivent avoir lieu des élections. Les malades, blessés et vieux de plus de 50 ans ont été libérés cette semaine et maintenant cela doit continuer. Mais quand viendra notre tour ? D’autre part plusieurs groupes de quelques milliers ont quitté le camp cette semaine. Où sont-ils allés ? Il paraît qu’ils sont venus dans un « Ernteeinsatz » ! Au moins vont-ils quitter les barbelés. Là il n’y aurait pas de surveillant russe, le chef de groupe étant responsable pour ses 40 hommes. Cela doit déjà être un grand soulagement de n’avoir plus de barbelés devant soi.

Ce qui cause encore un grand mécontentement c’est le manger qui devient tous les jours moins bon et épais. C’est tout juste si on a une dizaine de fois et encore chaque fois faut-il voir des incorrections pendant la distribution. Les chefs de groupes ont chaque fois matin et soir le double de notre manger. Pourquoi ces différences ? Cela rend seulement les autres jaloux. Les chefs de baraques ont « x » fois notre ration et seulement du consistant.
J’ai toujours cru que si la guerre était une fois finie, ces injustices cesseraient aussi. Mais ceux qui nous ont bourré le crâne avant et bien vécu ont maintenant aussi la parole. Enfin je leur souhaite qu’ils puissent la garder encore pendant une dizaine d’années.
Malgré toutes ces discussions matérielles à longueur de journée, il faut garder courage et espoir.

Je suis sûr que cela ne peut plus durer bien longtemps, tout au plus encore quelques jours et ensuite la liberté nous sourira et le retour dans nos foyers sera d’autant plus beau, car c’est pour le moment le seul et unique désir de chacun qui peut encore rentrer tranquillement chez lui avec la conscience tranquille. D’autres qui ont à redouter leur attitude pro-allemande font toujours circuler les bruits les plus pessimistes et malheureusement beaucoup les croient, surtout les tout jeunes. Mais que ceux-là puissent rester encore bien longtemps ! Moins de mon côté, je n’ai qu’une pensée jour et nuit, le retour auprès de ma femme, de mon Roby et de toute la famille. Dieu permette que cela soit bientôt.

23 juillet 1945

Une semaine a encore commencé derrière les barbelés ! Sera-ce définitivement la dernière ? On en parle beaucoup et moi-même je suis sûr que cela ne peut plus durer longtemps.
La semaine dernière de nombreux malades ont été libérés, il faut bien que notre tour approche. Il est grandement temps aussi, car les nerfs commencent à être à bout ! Ce n’est pas étonnant.
Tous les jours, des centaines, voire deux à trois milliers sortent du camp libérés, musique en tête. Quel beau jour ce sera pour moi quand je serai du nombre. Je crois que ce sera le plus beau aujourd’hui de ma vie.

25 juillet 1945

C’est ma fête aujourd’hui la Saint Jacques. Ma Cécile chérie m’écrit l’année dernière que je serai sûrement plus heureux à cette date qu’en 1944. En effet nous approchons à pas rapides de la libération. Mais on a mis tous les alsaciens-lorrains ensemble, quelques uns sont venus de Gärlitz et maintenant nous attendons avec impatience le moment de quitter les barbelés. Sera-ce encore aujourd’hui ? En tout cas je suis persuadé que ce n’est plus qu’une question d’heures.

 

 

 

26 juillet 1945

Hier un grand nombre d’alsaciens-lorrains est venu grossir nos rangs. On doit être près de 2000. Il y en a qui sont venus de Dresde et de Pirna. Ils ont sûrement mieux vécu que nous au point de vue de nourriture. Entlausung en vitesse ! On avait raconté qu’un transport de 2000 hommes allait en « Arbeitskommando » vers l’Ouest et que les alsaciens-lorrains feraient un bout de chemin avec eux !! Ce matin tout semble redevenu normal, à ce qu’il paraît, un contre ordre est arrivé.
Mais pour si peu, nous ne perdons pas courage et l’espoir et sûrement que dans quelques jours nous serons à la maison.

27 juillet 1945 : en chemin de fer !

Hier après-midi on a quand même quitté ce maudit camp de Elsterhorst. On a été embarqué à la gare de Hoyerswerda dans les wagons à bestiaux avec barbelés. Où va-t-on aller ! Pour le moment nous sommes à Lübben en direction de Berlin après avoir passé à Senftenberg et Cottbus. Les alsaciens-lorrains sont dans des wagons à part. Que va-t-on faire avec nous ?

18 août 1945

Depuis deux semaines déjà, je n’ai plus fait d’inscription dans mon carnet.

Le temps a passé bien lentement, chaque jour on était déçu de rester toujours dans ce satané camp. Mais aujourd’hui j’y crois plus que jamais. Cela ne peut plus durer bien longtemps. Hier encore on a envoyé des Français ici depuis Berlin pour faire partie du transport de rapatriés devant être formé. Évidemment on perd patience à attendre le départ.
Toutes les nuits je rêve à mes deux chéris à la maison. Il faut encore attendre quelques jours et bientôt je pourrai les serrer définitivement dans mes bras et ne plus nous quitter.

28 août 1945

Un jour passe après l’autre. Le camp est vide sauf les étrangers ! (=autres que les Allemands) Quand partirons-nous ? Il en arrive tous les jours encore des nouveaux, ce soir de Pologne. Les Français vont maintenant travailler en ville ! Qui aurait dit cela il y a quinze jours encore ? Les nerfs sont à bout. Quand je pense combien ma chérie doit se faire de mauvais sang à la maison. Ici on passe les derniers beaux jours de l’année derrière les barbelés. Enfin nous avons toujours la certitude d’être transportés à la maison. Et cela me console beaucoup.

11 septembre 1945

Pour le moment nous sommes encore avec le transport en route à Alverberg près de Helmstedt à la ligne de démarcation anglaise.
Cela fait déjà deux jours que nous nous arrêtons ici. Les Anglais voulaient d’abord nous conduire dans un camp et nous garder quelques jours en quarantaine mais on va quand même continuer.

Tout de même grand changement d’atmosphère. On remarque au moins on est entre gens civilisés. Tant qu’on était en zone russe tout était sale, pas d’ordre, un ravitaillement plus à décrire. Le marché noir battait son plein. On a tout échangé toutes nos fringues contre du tabac, du pain, etc. à chaque halte presque, tout le transport s’est précipité dans les champs de pommes de terre et de légumes. Quels dégâts ! Mais la faim ne connaît pas de formes. On l’a bien fait chez nous aussi !

Ici en zone anglaise, on respire bien plus librement. Le ravitaillement a été fourni par la Croix-Rouge française. Quelle joie quand on a vu de nouveau toutes ces bonnes choses ! Pain blanc comme neige, chocolat, etc. On se réjouissait comme des enfants à Noël devant le sapin. Tout a aussi été donné avec joie et amour. On nous a vraiment très bien reçus. Quelle belle cordialité française. Nous nous sentons tout à fait des autres hommes. Vraiment nous sommes fiers d’être français et nous saurons le prouver quand nous serons à la maison. Personne ne pourra plus nous séparer de notre chère patrie.

12 septembre 1945 : fin du journal de captivité tenu dans le carnet

« Camarades de captivité » listés dans le carnet 

Mon grand-père a dressé une liste de camarades avec qui il était en captivité, avec leurs adresses et village d’origine. Des Mosellans et Alsaciens, sans doute tous des malgré-nous

  • HERTRICH Lucien – 62 Nordhouse, Erstein / Bas-Rhin
  • JELGER René – Galfing / Haut-Rhin
  • HOUVER Adrien – Hundling
  • HEISE Germain – Chemin des Pélerins, Marienthal / Bas-Rhin 
  • MEYER Auguste – 50 Hohwart (arrondissement Sélestat) / Bas-Rhin 
  • DIETSCH Frédéric – Hatten (arrondissement Wissembourg) / Bas-Rhin 
  • HEINTZ Jules – 86 rue de Mittelhausbergen, Strasbourg – Cronenbourg, 
  • STRAUB Michel – 25 Eckwersheim / Bas-Rhin
  • GRISS François – 5 rue Jean Jaurès, Mulhouse / Haut Rhin
  • HENRICH Pierre – rue de Deux Ponts, Neunkirch – Sarreguemines
  • ANWEILER Jean – 13 rue du Château, Forbach
  •  KLEIN Pierre – 44 rue St Rock, Stiring-Wendel
  • DALSTEIN Nicolas – 10 rue de Provence, Creutzwald la Croix
  • SAAM Jean – 12 rue Teyssier, Bitche
  • ARNOULD Josef – 38 rue des Arènes, Metz Sablon

 


Les textes qui suivent complètent le récit du carnet, et ont été écrits en 1991

15 septembre 1945 : Valenciennes

Nous sommes au Centre de Rapatriement de Valenciennes après avoir roulé quelques jours à travers l’Allemagne, les Pays-Bas (Eindhoven), Bruxelles (Schoerbeck) on nous délivre la carte de Rapatrié et chacun peut envoyer un télégramme chez soi : « Rentrée imminente », tous nos espoirs sont comblés.

15 septembre 1945

Télégramme envoyé du Centre de Rapatriement de Valenciennes : « Rentré France. Bonne santé. Arrivée imminente. Jaques Sadler »

16 septembre 1945 : carte de rapatrié

18 septembre 1945 : Chalon sur Saône

Nous continuons vers Chalon sur Saône où nous sommes libérés au centre de triage des Alsaciens Lorrains.

Certificat de Libération du 18-09-1945

19 septembre 1945 : départ de Chalon sur Saône pour Sarreguemines

A travers l’Alsace. Mais les lignes de chemin de fer sont à peine réparées et les trains ne circulent pas trop vite. On voudrait parfois sortir et aider à pousser.

20 septembre 1945 vers 19h : me voilà enfin à la gare de Sarreguemines

Je crois vraiment rêver. Je n’ai plus qu’une hâte : regagner la ferme de la Cité le plus rapidement possible.

Et pas très loin de la gare qui vois-je : Ma chérie qui est venue sans trop savoir que j’allais rentrer ce soir ; enfin je la tiens dans mes bras. Un affreux cauchemar est fini, je suis le plus heureux des hommes. Et maintenant rentrons vite pour embrasser Petit Roby. Mais il ne me reconnait pas ! Le papa ce n’est pas moi, mais la photo ! Moi, je suis le nounou Papa (Tonton Papa). Dieu soit loué, je suis rentré sain et sauf parmi mes chéris.

Quel instant inoubliable.

Autres articles similaires

5 réponses à « Journal de captivité de mon grand-père SADLER Jacques, malgré-nous de 1943 à 1945 »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *